La pré-collecte des ordures ménagères, un créneau porteur
Les éboueurs ont pour vocation de débarrasser les ménages abonnés à leurs services de leurs lots quotidiens de déchets ménagers. Une activité quoique assimilée à une basse besogne dans l’imaginaire collectif national, permet à nombre de personnes de s’éloigner des affres de la précarité et du chômage.

Quarante mille francs Cfa (environ 80 euros) par mois. C’est le salaire moyen d’un éboueur. Les Organisations non gouvernementales (Ong) de pré-collecte d’ordures ménagères qui strient la ville de leurs charrettes et tricycles fournissent ainsi de l’emploi à des centaines de Béninois. Tenez, il y a, rien qu’à Cotonou, 77 de ces Ong, qui emploient sur toute l’année et de façon permanente au moins trois personnes, et des travailleurs occasionnels pour des tâches ponctuelles, des remplacements ou des renforts.
Petit arrêt dans une de ces structures ayant à charge l’hygiène de la ville. Ici, à l’Association des frères de l’humanité (Afh), le premier pas dans la rue pour vider les poubelles des maisons remonte à 1998, mais de façon officielle, cette Ong existe depuis l’an 2000. Elle a plusieurs employés : deux éboueurs réguliers à 40.000 francs Cfa par mois chacun et un éboueur occasionnel payé à la tâche, sans oublier les percepteurs engagés de façon ponctuelle pour le recouvrement des redevances auprès des ménages chaque mois, des percepteurs ristournés de 1500 à 2000 FCFA sur 10.000 F Cfa de recouvrement au profit de l’Ong. En plus de ces travailleurs, il y a un bureau constitué du directeur, d’un adjoint ou vice-président chargé du suivi et d’une trésorière, payés selon les frais d’abonnement collectés auprès de la clientèle. Leur salaire est donc tributaire de la moisson récoltée. Ledit salaire varie entre 15.000 et 35.000 francs Cfa par mois, en fonction de la régularité de paiement des abonnés. A titre d’illustration, l’Ong Afh couvre 827 maisons sur la zone de Houèyiho II dans la partie est de Cotonou. Des 827 maisons, seulement 178 ont souscrit l’abonnement aux services d’Afh, soit 21,52% du total. Même pas le quart. Un problème environnemental sérieux, car le constat prouve que certains de ces non-abonnés se débarrassent de leurs ordures dans les bas-fonds, ou les vident dans les voies d’évacuation d’eaux usées de façon plus ou moins discrète, voire carrément dans la rue, sur les terrains vagues ou des maisons en chantier abandonnées. Une attitude qui fait dépenser la municipalité de Cotonou, par exemple en travaux supplémentaires dans les caniveaux et autres collecteurs d’eaux usées, qu’il faut déboucher. Conséquence, les impôts des citoyens sont détournés d’objectifs importants pour refaire un travail résultant de l’incivisme…mieux de la pauvreté.
Le ramassage d’ordures ménagères coûte en moyenne 2.000 francs Cfa (3 euros) par maison. Mais le prix peut varier en fonction du volume de déchets, du nombre d’habitants de la maison ou du nombre d’appartements dans l’habitat. Ainsi, certains domiciles peuvent payer 1.500 francs tandis que d’autres foyers paient 2.000, 2.500 voire 3.000 francs Cfa par mois pour trois interventions des éboueurs par semaine.
Un énorme manque à gagner
Selon Rosaire Kassa, vice-président de l’Ong Afh, sur les 178 maisons couvertes, beaucoup ne paient pas leur contribution. Ce qui fait que parfois, les contrats sont rompus et certains arriérés ne sont jamais recouvrés. « Pour ce mois de mars, nous devons collecter au moins 208.000 francs Cfa, rien que pour les abonnés de l’ordre de 2.000 francs par mois », dit-il. Mais il n’est pas sûr qu’eux tous paieront, pas plus que les abonnés de 1.500 francs ou les autres. « Or si tout le monde payait régulièrement ses dus, les Ong travailleront mieux parce que cet argent sert à nous payer mais aussi à assumer toutes les autres charges (loyer, eau et électricité, charrettes et imprévus, etc., ndlr) », conclue-t-il. De plus, la mairie ne leur prélève rien. Comme quoi, les ordures, ont des avantages.
Selon Ganiou Akande, directeur de la Coordination des Ong de gestion des déchets ménagers et de l’assainissement (Cogeda), l’instance qui dirige toutes les Ong de pré-collecte des ordures ménagères à Cotonou, il existe dans la capitale économique 12 dépotoirs ou points de regroupement. C’est dans ces endroits que les Ong de collecte d’ordures vident leur « moisson », qui est collectée et convoyée par la suite hors de la ville pour traitement, notamment à Ouessè, où se trouve un site d’enfouissement sanitaire. Cette tâche est effectuée conjointement par la Cogeda, la Direction des services techniques de la mairie de Cotonou et des entreprises spécialisées, telles qu’Omoloto.
Encadré
Une charrette de collecte d’ordures ménagères coûte de 250.000 à 300.000 francs Cfa (entre 400 et 500 euros). Un tricycle motorisé de collecte d’ordures coûte environ 800.000 francs (environ 1 200 euros) selon la marque. De 35 concessions abonnées à Cotonou en 1991, le nombre a évolué pour atteindre 71 concessions abonnées en 1993, 267 en 1994, 1046 en 1995, 12.500 en l’an 2000, 24.065 en 2003, et plus de 40.000 en 2013.
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