Incontournables traîneurs de pousse-pousse

Article : Incontournables traîneurs de pousse-pousse
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11 mars 2013

Incontournables traîneurs de pousse-pousse

Ils sont estimés à plus de seize mille dans la ville de Cotonou au Bénin. Un chiffre qui témoigne de leur forte présence et par conséquence de leur importance au sein des marchés de la ville. Zoom sur un métier difficile.

 Qu’on se le tienne pour dit. C’est un métier difficile. Traîner un pousse-pousse chargé de marchandises pesant plusieurs centaines de kilogrammes, voire avoisinant parfois la tonne, sous le chaud soleil de Cotonou, pour gagner sa vie, est loin d’être une partie de plaisir. Cependant, ils sont là, bien présents, aux abords des marchés, participant par leurs activités génératrices de revenus, à l’économie du pays et se rendant chaque jour indispensables, à travers les services rendus aux usagers des marchés de la ville.

Deux cent francs Cfa (moins du tiers d’un euro), c’est le minimum à payer pour une course à effectuer par ces bourreaux du travail. Mais en fonction de la taille, de la qualité ou du poids des marchandises à transporter et en fonction du trajet à effectuer, le coût peut augmenter jusqu’à 1000 francs Cfa (moins de 2 euros), voire plus. Il s’agit là des traîneurs de pousse-pousse ambulants, à en croire Cyriaque Gbèhou, secrétaire général de l’Association des traîneurs de pousse-pousse de Cotonou (Atpc).

Dans la cité économique du Bénin, ils sont aujourd’hui 15.200 à exercer ce métier qui, il y a moins de quinze ans, était un secteur purement informel et sans organisation. La mise sur pied de l’Atpc en 1999 a permis d’organiser ce secteur d’activités. De 200 traîneurs de pousse-pousse à cette époque, le nombre a considérablement augmenté pour atteindre 13.587 en 2010 et plus de 15.000 de nos jours.

Les traîneurs de pousse-pousse, si l’on s’en tient aux témoignages recueillis à Gbogbanou (marché Tokpa), ont connu ce qu’on pourrait considérer comme l’âge d’or de leur profession, à la fin des années 2000 où le Bénin a enregistré une croissance démographique importante (de 6 millions et demi d’habitants à plus de 8 millions entre 2004 et 2010) et économique non moins négligeable (plus de 2% par an sur les dernières années).

Arouna, sexagénaire, ancien traîneur de pousse-pousse reconverti dans le commerce à la sauvette, témoigne : « L’on pouvait trouver des marchés qui nous rapportaient jusqu’à 30.000 francs Cfa (un peu moins de 50 euros) la journée. Aujourd’hui, plus rien. »

Plus rien…façon de parler certainement. Cyriaque Gbéhou donne des chiffres précis : « Un traîneur de pousse-pousse ambulant, s’il est travailleur, peut gagner par jour 8.000 francs Cfa (environ 13 euros). Pour ceux qui sont attachés à des commerces de particuliers, ils peuvent percevoir entre 10 et 15, voire 18.000 francs Cfa (20 à 30 euros), surtout les jours de grande affluence. Même les pousseurs ambulants, ces jours-là, peuvent atteindre 15.000 francs Cfa (25 euros). »

Seulement, au terme de tous ces va-et-vient, le corps de l’homme reçoit parfois plus de coups qu’il n’en faut : « Work di pass money », dit un pousseur nigérian. Littéralement, « le travail dépasse l’argent. » Outre la chaleur et le stress, l’effort physique ou les altercations avec des clients peu ou prou indélicats, le traîneur de pousse-pousse a une famille à nourrir et bien sûr sa santé à ménager. Un assemblage d’éléments qui réduisent considérablement son gain. Au terme des dépenses dues à ces différentes charges, c’est à peine 2000 francs Cfa (un peu plus de 3 euros) qu’il peut épargner quotidiennement.

L’Atpc en bref

Si les traîneurs de pousse-pousse de Cotonou ont actuellement une certaine légitimité et une utilité certaine, elles sont dues – il serait difficile de le nier – à l’action de leur association de tutelle. Certes, l’adhésion est libre et le nombre de traîneurs de pousse-pousse de Cotonou est légèrement plus important que celui avancé par l’Atpc, qui ne peut fournir que les statistiques concernant ses affiliés. Toujours est-il que ceux qui exercent en « free-lance » ne bénéficient pas de la même confiance des usagers des marchés de la ville que leurs confrères de l’Atpc. Et pour cause, en cas de vol, de perte ou de disparition de marchandises, il est aisé de retrouver le coupable s’il porte sa blouse bleu ou marron ainsi que son badge, contrairement aux pousseurs indépendants, qui sont dans l’informel. Pour preuve, clame Cyriaque Gbehou, « les cas de vol ont diminué. Avant, on enregistrait des dizaines de plaintes des clients. Or en 2012, nous n’avons enregistré que 8 plaintes, et 3 depuis le début de cette année. Et les pousseurs mis en cause sont toujours retrouvés, ainsi que les marchandises. »

L’Atpc, dont le siège se trouve au sein de la mairie du 5ème arrondissement à Gbobanou, est sous la tutelle de la Société de gestion des marchés (Sogema). Les dix membres du bureau de l’Atpc avouent ne rien reverser à la mairie qu’ils voient comme un partenaire, autant que la Sogema, dans la gestion des marchés de Cotonou. Béninois, Nigériens, Maliens, Nigérians, Centrafricains, Gambiens, au moins 10 nationalités sont représentées par les traîneurs de pousse-pousse de la ville vitrine du Bénin. L’affiliation à l’Association des traîneurs de pousse-pousse de Cotonou leur coûte à chacun 10.000 francs (15 euros), contrairement à 8300 francs Cfa (13 euros) il y a trois ans. Cette somme couvre la confection des blouses, des pièces d’identité – avec l’aide des ambassades pour les étrangers – et autres papiers formels et bien sûr les frais du Bureau, assisté d’une dizaine d’agents de sécurité au marché Tokpa et d’environ 80 délégués de zone, ces responsables qui constituent les relais du Bureau auprès des divers ressortissants de chaque pays.

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